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Tout ce que vous devez savoir sur la gestion thermique des batteries

authorIcon By Stéphane Melançon on December 15, 2023 topicIcon Batteries & EVs

Pour pouvoir fonctionner correctement, une batterie doit se trouver dans une plage de températures spécifique. Si elle est trop chaude ou trop froide, cela nuira à sa sécurité, ses performances et sa durée de vie.

La gestion thermique des batteries est essentielle dans les véhicules électriques et les systèmes de stockage de l’énergie, car elle permet de réguler la température des batteries. Elle utilise des systèmes de chauffage et de refroidissement pour maintenir la température dans une plage optimale, réduire au maximum les variations de température entre les cellules, permettre la suralimentation, prévenir les dysfonctionnements et les emballements thermiques, et maximiser la durée de vie de la batterie.

Cet article vous expliquera tout ce que vous devez savoir pour bien comprendre la gestion thermique des batteries.

Explication de la gestion thermique des batteries

La gestion thermique des batteries est un sujet complexe. Avant de vous plonger dans les différents types de systèmes de gestion thermique, vous devez connaître quelques concepts clés, comme l’origine de la chaleur dans les batteries, les raisons pour lesquelles la chaleur affecte les batteries et les températures de fonctionnement optimales.

Origine de la chaleur dans les batteries

Le courant électrique qui traverse les batteries rencontre une résistance dans divers matériaux. Par conséquent, une partie de l’énergie électrique est perdue sous forme de chaleur. La résistance se produit pendant le chargement et le déchargement, lorsque le courant passer à travers les électrodes, les électrolytes, les collecteurs de courant, les busbars et diverses interconnexions. Plus le courant est élevé, plus la chaleur générée est importante.

Raisons pour lesquelles les batteries sont affectées par la température

Les changements de température affectent les batteries, car la température a une influence sur l’énergie cinétique des molécules présentes dans les matériaux de la batterie (comme les électrolytes et les électrodes). Ainsi, ces matériaux deviennent plus ou moins conducteurs en fonction de leur température.

Effet de la température sur l’énergie cinétique

Dans des températures plus basses, les molécules ont une énergie cinétique réduite. Elles se déplacent alors plus lentement et entrent en collision moins souvent. Dans des températures plus élevées, en revanche, les molécules se déplacent plus rapidement, entrent en collision plus souvent et entraînent ainsi davantage de réactions chimiques.

Molécules se déplaçant plus lentement à gauche (plus froides) et plus rapidement à droite (plus chaudes), montrant que la température affecte leur énergie cinétique.
Image tirée d’une présentation sur l’énergie thermique

Exemple : batteries au lithium-ion

Pendant la décharge des batteries au lithium-ion, les ions de lithium se déplacent de l’électrode négative jusqu’à l’électrode positive, en passant par l’électrolyte et les électrodes.

Dans des températures plus basses, ces matériaux ralentissent les électrons qui passent à travers eux, car ils deviennent plus résistants à l’écoulement des ions, ce qui réduit leur conductivité. Pendant les froides journées d’hiver, par exemple, les batteries de voitures électriques doivent se réchauffer au moyen de boucles de chauffage pour garantir une bonne conductivité et des performances optimales, ce qui augmente leur consommation d’énergie.

Dans des températures plus élevées, les électrons se déplacent plus rapidement. La batterie profite ainsi de performances de charge plus rapides, mais ses composants se dégradent plus rapidement. Augmenter la température des batteries permet de répondre aux besoins de suralimentation des consommateurs, au détriment de la durée de vie des batteries.

Température optimale des batteries

L’effet de la température sur les batteries dépend de la composition chimique de ces dernières.

 

Les batteries au lithium-ion, utilisées dans la plupart des voitures électriques, peuvent fonctionner à des températures allant de –20 à 60 °C. Cependant, leur plage de température optimale (celle à laquelle elles offrent les meilleures performances) est comprise entre 15 et 35 °C.

Pour maximiser les performances et la longévité des blocs-batteries, il est essentiel de maintenir une distribution uniforme de la température dans toutes les cellules de batteries. Idéalement, la variation de température maximale de la surface ne devrait pas dépasser 5 °C.

Effet de la température sur les batteries au lithium-ion, entraînant une résistance accrue à basse température et des réactions parallèles plus intenses à haute température.
Image tirée de l’article Battery thermal management systems : Recent progress and challenges

Chaque type de composition chimique de batterie présente des caractéristiques uniques qui affectent son comportement à différentes températures. Par conséquent, le type de batterie influence considérablement la gestion thermique de la batterie.

Températures de charge et de décharge de différents types de compositions chimiques de batteries.
Image tirée de l’article BU-410: Charging at High and Low Temperatures

Méthodes de refroidissement des batteries

L’une des principales fonctions d’un système de gestion thermique de batterie consiste à extraire la chaleur des batteries afin de prévenir la dégradation de ses composants ainsi que les emballements thermiques. Voici les différentes méthodes de refroidissement et la manière dont elles affectent la conception et l’efficacité de la batterie.

Refroidissement passif ou actif

Les méthodes de refroidissement de batterie sont classées en deux catégories : refroidissement passif et refroidissement actif.

Les méthodes de refroidissement passif s’appuient sur la dissipation naturelle de la chaleur, comme le rayonnement et la conduction, pour extraire la chaleur de la batterie. Elles peuvent utiliser des matériaux présentant une grande conductivité thermique, ou impliquer des décisions de conception comme l’utilisation de boîtiers ou de structures de batteries qui favorisent l’écoulement de l’air entre les cellules pour dissiper la chaleur.

Les batteries à refroidissement passif sont omniprésentes dans notre quotidien. Vous pouvez les retrouver dans les téléphones mobiles, les ordinateurs portables, les haut-parleurs Bluetooth et la plupart des appareils électroniques grand public fonctionnant sur batterie.

Les méthodes de refroidissement passif sont plus simples, nécessitent un entretien réduit et coûtent moins cher. Cependant, elles sont souvent moins efficaces pour extraire la chaleur, et leur efficacité peut varier en fonction des conditions environnementales.

Les méthodes de refroidissement actif utilisent des appareils externes pour réguler et dissiper activement la chaleur de la batterie. Elles emploient des composants tels que des ventilateurs, des pompes et des compresseurs pour faire circuler de l’air ou un liquide à travers le système de batterie. Les systèmes à refroidissement actif utilisent également des capteurs et d’autres outils pour surveiller la température et ajuster le refroidissement. Ces composants doivent être alimentés et contribuent dès lors à la consommation d’énergie de la batterie.

Les méthodes de refroidissement actif offrent une précision et un contrôle accrus, ce qui permet de maintenir plus facilement la température de la batterie dans une plage spécifique. Elles extraient également plus efficacement la chaleur. Cependant, elles sont plus complexes, consomment plus d’énergie et nécessitent un entretien supplémentaire.

Refroidissement par air ou par liquide

Le refroidissement par air et le refroidissement par liquide sont les méthodes de refroidissement les plus couramment employées dans les voitures électriques. Ce sont toutes deux des méthodes actives.

Les systèmes de refroidissement par air utilisent des ventilateurs ou des souffleuses pour générer un flux d’air permettant d’extraire la chaleur des composants de la batterie. Le refroidissement par air est simple, relativement peu coûteux et économe en énergie. Cependant, l’air est un thermoconducteur moins efficace que d’autres solutions. C’est pourquoi de nombreux fabricants de batteries de voitures électriques ont abandonné le refroidissement par air pour leurs véhicules électriques de plus haute gamme.

Les systèmes de refroidissement par liquide utilisent des pompes ou d’autres composants mécaniques pour faire circuler un liquide de refroidissement à travers des conduites en contact direct avec les cellules ou les modules de batteries afin d’absorber la chaleur. Ce liquide est ensuite acheminé vers des composants tels que des échangeurs thermiques, des radiateurs ou des ventilateurs qui vont évacuer la chaleur. Parmi les liquides de refroidissement, on retrouve l’eau, le glycol, l’huile, l’acétone et les fluides frigorigènes.

Le refroidissement par liquide peut se faire de différentes manières. Certains fabricants ajoutent des circuits de refroidissement entre les cellules (plaques ondulées). D’autres ajoutent des plaques de refroidissement sous les cellules (plaques inférieures). Ces plaques sont responsables du transport de la chaleur à l’écart des cellules.

Pourquoi le refroidissement par liquide est-il plus efficace que le refroidissement par air ?

Le refroidissement par liquide est un processus plus complexe et plus coûteux que le refroidissement par air, mais il est également plus efficace, ce qui en fait un choix plus approprié pour les applications intensives de gestion thermique. En effet, les liquides ont une capacité et une conductivité thermiques plus importantes que l’air en raison de leur plus grande densité.

Capacité thermique Conductivité thermique

En raison de leur plus grande densité, les liquides ont une masse plus importante que l’air. Plus de masse signifie plus de molécules, et plus de molécules signifie plus de possibilités pour stocker l’énergie. Par conséquent, pour un même volume, les liquides peuvent absorber davantage de chaleur que l’air.

L’eau peut absorber environ 4,18 joules d’énergie par gramme avant de chauffer de 1 °C, tandis que l’air ne peut absorber que 1,005 joule d’énergie par gramme avant de chauffer de 1 °C (source).

En raison de leur plus grande densité, les liquides possèdent davantage de molécules qui sont en contact avec la surface chaude, ce qui leur permet d’absorber plus de chaleur à la fois. Autrement dit, les liquides absorbent la chaleur plus rapidement que l’air.

En matière de volume, 1 g d’eau équivaut à 1 ml d’eau, tandis que 1 g d’air équivaut approximativement à 1 l d’air. Cela montre que l’eau entre plus efficacement en contact avec la surface et peut donc mieux conduire la chaleur.

Technologies de refroidissement émergentes

Le refroidissement par air et le refroidissement par liquide sont les méthodes de refroidissement les plus couramment employées dans les voitures électriques, mais de nouvelles technologies sont en cours de développement. Bien qu’elles ne soient pas encore prêtes à être lancées sur le marché, elles ont le potentiel d’améliorer considérablement la gestion thermique des batteries.

Matériau à changement de phase

Les matériaux à changement de phase (MCP) sont des matériaux qui gèrent la chaleur en changeant de phase : ils passent du solide au liquide ou du liquide au gaz lorsqu’ils absorbent de la chaleur, puis ils reviennent à leur état initial lorsqu’ils évacuent cette chaleur. Lorsque la batterie atteint une température critique, ces matériaux changent de phase et évacuent très efficacement la chaleur.

Solution de composites à changement de phase (CCP) proposée par AllCell. Les CCP sont des MCP mélangés dans une structure solide.
Solution de composites à changement de phase (CCP) proposée par AllCell. Les CCP sont des MCP mélangés dans une structure solide.

Lors de la sélection d’un matériau à changement de phase, la température de fusion et la température de solidification sont certains des éléments les plus importants à prendre en compte. Parmi les autres éléments qui déterminent le choix du matériau, on retrouve la conductivité thermique, la capacité thermique, la chaleur latente (c.-à-d. la quantité de chaleur absorbée/libérée pendant les changements de phase), la capacité à supporter des changements de phase répétés sans se dégrader et la comptabilité avec les composants du bloc-batterie. Les matériaux tels que le graphite expansé et la mousse métallique ont le potentiel d’améliorer grandement la dissipation thermique des batteries.

Les matériaux à changement de phase sont utilisés pour le refroidissement passif. Ils font partie intégrante de la conception de la batterie et ne nécessitent pas de composants supplémentaires, comme des ventilateurs ou des pompes, qui consomment l’énergie de la batterie.

Refroidissement par immersion

 

Le refroidissement par immersion est une méthode dans laquelle les cellules et les modules de batteries sont immergés dans un liquide non conducteur (liquide diélectrique) pour en dissiper la chaleur. Le refroidissement par immersion est un processus très efficace qui permet une distribution plus uniforme de la chaleur entre les cellules de la batterie, ce qui améliore les performances et la durée de vie de celle-ci. Il prévient également l’humidité dans la batterie, une cause de défaillance des batteries de voitures électriques actuelles.

Les fabricants de batteries devront résoudre plusieurs défis avant de pouvoir mettre en œuvre le refroidissement par immersion. En effet, cette méthode nécessite la conception d’une batterie entièrement imperméable aux liquides. De plus, les liquides diélectriques alourdissent la batterie, un élément important à prendre en compte pour l’optimisation de l’autonomie.

Autre difficulté : le choix du liquide le plus approprié. Selon une étude sur les liquides diélectriques, la sélection du liquide dépend de la conductivité thermique, de la capacité thermique, de la stabilité chimique, de la viscosité et de la compatibilité avec les matériaux de la batterie avec lesquels il sera en contact. Parmi les liquides diélectriques testés pour la gestion thermique des batteries, on retrouve les huiles minérales, les huiles d’ester et les huiles de transformateur.

Matériaux d’interface thermique

Les matériaux d’interface thermique (TIM) sont des matériaux que l’on insère entre deux surfaces pour améliorer le transfert de chaleur entre elles. Ils jouent un rôle essentiel dans le transfert efficace de la chaleur entre les cellules de batteries et les éléments de refroidissement tels que les dissipateurs thermiques, les plaques et les liquides de refroidissement. Parmi les TIM, on retrouve des pâtes, des adhésifs, des matériaux de remplissage, des tampons et des matériaux à changement de phase.

Avant d’appliquer un matériau d’interface thermique entre deux surfaces, il convient généralement de préparer la surface afin de garantir une bonne qualité d’adhérence. La préparation de surface au laser est une technologie permettant d’éliminer les contaminants, d’optimiser la rugosité de la surface et de modifier la composition chimique de celle-ci. Elle crée les conditions optimales qui garantissent une liaison solide entre le matériau d’interface thermique et les composants de la batterie.

Les batteries du futur auront besoin d’une meilleure gestion thermique

Les avancées actuelles en matière de batteries de voitures électriques ont révélé le besoin d’une gestion plus efficace de la chaleur. La suralimentation génère plus de chaleur, et l’augmentation de la densité énergétique des batteries signifie qu’elles accumulent davantage de chaleur dans un volume plus petit. Cela montre que le futur des voitures électriques dépendra des progrès réalisés en matière de gestion thermique.

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Stéphane Melançon

Technical expert and consultant in batteries and electrical propulsion systems, Stéphane holds a Physics degree with specializations in Photonics, Optics, Electronics, Robotics, and Acoustics. Invested in the EV transformation, he has designed industrial battery packs for electrical bikes. In his free time, he runs a YouTube channel on everything electrical.